En quittant Humberstone et la côte pacifique, nous nous dirigeons vers d'autres geysers: ceux de Puchuldiza. Nous mettons du temps à les trouver : sur une piste avant Colchane -ville frontière avant la Bolivie- au milieu de nulle part et ne rencontrant personne, il ne nous est pas facile de mettre la main dessus. Pour cela, nous avons quitté la côte pour monter sur l'altiplano. Il fait froid la nuit mais les journées sont ensoleillées et les paysages sont saisissants. Le détour vers les geysers en vaut vraiment la peine. A l'orée d'un lac de montagne -ou un salar?- seuls les lamas, vigognes ou guanacos au choix nous accueillent lorsque nous descendons pour nous approcher du site. Il y a bien quelques maisons en pisé mais elles semblent vides. Comme beaucoup de villages que nous rencontrerons par la suite... Un geyser crache un jet d'eau bouillante à plus de 5 mètres de haut. Tout autour, des trous bouillonnent et donnent à voir une activité volcanique inquiétante. On se demande si le sol est bien solide et si on ne va pas se retrouver au milieu d'une piscine d'eau bouillante au moindre faux pas. Les couleurs sont surréalistes: l'orange, le vert, le marron dégoulinent en se mélangeant parfois et sont entraînées vers la vallée grâce à l'eau affleurant partout. Comble du bonheur, nous trouvons des thermes aménagés surplombant cette magnifique vallée. Nous sommes dans un décor idyllique et malgré le froid et le vent, nous ne résistons pas à l'envie de plonger dedans! Nous y passons un bon moment à patauger mais la sortie est rude...
Nous poursuivons la route pour emprunter une piste recommandée par la famille Lebris. Elle longe la frontière bolivienne et passe encore par un salar et de nombreux thermes. Nous sommes toujours à environ 4500 mètres d'altitude. Cette fois ci, en montant progressivement, nous ne ressentons aucune gêne. La piste commence par le « Parque nacional Volcan Isluga » et c'est au pied de ce même volcan que nous passons une nuit et essuyons notre premier orage de « l'hiver bolivien ». Nous n'avons pas vraiment compris pourquoi ni comment mais, à cette saison, chaque soir, un orage éclate sur l'Altiplano. Les couleurs, le jeux des nuages mouvants et les éclairs rendent ces paysages sauvages encore plus impressionnants. Les troupeaux de lamas rentrent de leur journée de pâturage. On a même l'impression qu'ils se guident seuls mais nous finissons toujours par apercevoir un berger solitaire parmi ces troupeaux imposants.
Nous passons par de nombreux villages: Enquelga, Arabilla, Taipicollo, Paserijo. Malheureusement, hormis Enquelga avec sa belle église toute blanche, tous sont abandonnés. C'est d'ailleurs désolant. Les portes et les volets sont clos. Il n'y a rien de plus morbide qu'un village abandonné. On imagine facilement la difficulté de vivre dans pareils endroits: à 4500 mètres, sans eau, ni électricité, ni chauffage. Néanmoins, comment vivent aujourd'hui ces familles, en ville?
Nous faisons une halte à « Aguas Calientes ». Ces thermes ne sont pas très attrayants. Par contre, les paysages l'environnant nous bluffent littéralement. Il n'y a pas d'arbres mais des touffes d'herbes hautes et des mousses d'un vert fluo tapissent les rochers. Les vizcachas sautent et se déplacent rapidement parmi les rochers et les herbes. Nous rencontrons un suisse voyageant en vélo: Georges. Cela fait deux mois environ qu'il pédale dans le nord chilien. Nous passons un moment avec lui et nous nous donnons rendez-vous pour le lendemain, au salar de Surire.
Quand nous le quittons, l'orage se lève. A l'arrivée au salar de Surire -classé monument national à juste titre- un spectacle époustouflant nous accueille: les éclairs zèbrent le ciel et meurent sur le lac blanc. Le tonnerre gronde et nous restons un bon moment à admirer ce spectacle envoutant. Nous nous sentons minuscules devant la majesté de cette activité naturelle mais nous ne risquons rien. Seul le tonnerre grondant à intervalles réguliers nous fait parfois frissonner. Nous avons devant nous les paysages les plus saisissants du voyage. Des flamants roses se déplacent majestueusement dans le lac. Des vigognes, des lamas et des guanacos farouches broutent à ses alentours. L'eau de la pluie assombrit les touffes d'herbes paraissant calcinées. Les sommets entourant le salar sont surmontés de neige.
Nous bivouacons pour deux nuits aux thermes Polloquere. Le lieu est paradisiaque: Les vapeurs provoquées par la différence de température rendent ces lieux magiques et énigmatiques. Le réveil au milieu des montagnes, auprès des flamands roses et entourés de brouillard est inoubliable. Je passe un bon moment à déambuler dans un calme absolu. Le ciel est d'un bleu limpide et les montagnes se reflètent dans les eaux du lac. Nous nous baignons dans l'eau chaude des thermes même si elle sent fort le souffre et qu'une bonne couche de boue grise parsème ses fonds. Il nous faut d'ailleurs nous éloigner des sources et nous approcher du lac pour avoir une bonne température!
Le soir, nous retrouvons Georges et passons la soirée recroquevillés dans la voiture car l'altiplano la nuit est glacial et l'orage est toujours fidèle au rendez-vous! Pourtant, bien couverts, nous n'avons pas froid. Même les filles dans la tente ne se plaignent pas. Par contre, les couchers sont plus difficiles: quand il faut se déshabiller et entrer dans le duvet gelé, c'est la rébellion...
Pour continuer la piste vers le nord, nous longeons et contournons le lac. C'est un régal! Nous battons un nouveau record d'altitude: 4800 mètres sans le moindre symptôme particulier. Nous traversons Guallatiri, petit village au coeur de la « Reserva nacional Las Vicunas » dans laquelle nous voyons effectivement beaucoup de camélidés. Les carabineros nous apprennent que ce village ne compte plus qu'un seul habitant. Il nous paraissait pourtant vivant avec sa petite église et ses dizaines de maisons bien entretenues! Nous rêvions de pain frais, fait maison et cuit au four traditionnel...
Nous passons devant les thermes de Churiguaya et arrivons peu de temps après à la frontière entre la Bolivie et le Chili. Nous bifurquons vers le lac Chungara, au pied du majestueux volcan Parinacota au cône parfait. La piste est terminée et c'est un vrai bonheur de retrouver le goudron! Nous avons roulé tranquillement pendant 5 jours dans des espaces vierges et inhabités. Cette région est fabuleuse et bien que difficile -les températures y sont extrêmes- nous y laissons des souvenirs intenses. Nous reverrons peut-être l'Altiplano du côté bolivien, Incha Allah!
Mars 2010 : Sur l'altiplano Chilien, Salar de Surire |
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